lundi 8 décembre 2008

Les athées et la spiritualité

Il est une réflexion qui revient souvent au sujet des athées: «Vous n'avez pas de spiritualité". Cette attaque souvent teintée d'un profond mépris mérite que l'on s'y attarde. En effet elle suppose différentes choses. Si l'on se penche quelque peu sur cette phrase, il est intéressant de dégager ce qu'elle affirme.

- La spiritualité est quelque chose de profondément religieux.
- Il est nécessaire d'avoir de la spiritualité.
- Le bien et le mal, postulat monothéiste je le rappelle, se positionnent également par rapport à cette spiritualité que s'approprie le religieux.

Pour l'athée, il est différentes positions possibles. Celles-ci vont dépendre de chacun bien sur, mais également de la définition que l'on donne à la spiritualité.

Voici trois définitions du Petit Robert:

Spirituel:

1 Propre ou relatif à l'âme, en tant qu' émanation et reflet d'un principe supérieur et divin
2 Qui est d'ordre moral, n'appartient pas au monde physique.
3 Qui a de l'esprit, de la vivacité, de l'à-propos.

La première des définitions rattache la spiritualité au domaine de la religion, en tout cas de la croyance. Cependant, la négation du divin, du dualisme rentre dans cette catégorie. Un athée peut très bien accepter le concept de l'âme, mais en tant que concept. Une réflexion sur l'inexistence de dieu rentre dans le domaine de la spiritualité.
Par ailleurs, une prise de position telle que " Non, je n'ai pas de spiritualité, ce domaine ne me concerne pas, je ne le reconnais pas, cela n'est ni bien ni mal" est à mon sens spirituel. Cette affirmation questionne l'esprit, questionne ce domaine et donc est selon moi spirituelle ou tout du moins philosophique. Elle ne mérite en tout cas ni insulte, ni mépris.

Les deux autres définitions peuvent tout à fait correspondre à un athée. La morale, au sens philosophique du terme, n'est pas l'apanage des croyants. Pour l'athée, elle est construite par l'humain, pour le croyant (ou le dualiste), elle est bien souvent héritée, reçue, transmise. Il est certain qu’elles vont différer, mais ce sont là deux différentes manières d'avoir de la spiritualité. L'athée qui questionne est à mon sens plus spirituel que le croyant qui va à la messe par habitude, et observe les rites ans se poser la moindre question.

J'aimerais expliquer ce qu'est pour moi la spiritualité d'un athée, celle de l'athée que je suis. Si je pouvais y ouvrir un croyant, sans prosélytisme, ou juste un peu, n'ayez crainte, j'en serais ravi.

Pour moi, ce monde est une perpétuelle source d'interrogations. C’est en tant qu'être humain que je me les pose, peut-être même est-ce la condition pour que ces questions soient posées, sous cette forme en tous cas. Je vais poser des concepts, humains c'est certain, ils ne sont que mon interprétation, mais qui selon moi sont une forme de spiritualité. La beauté, l'émerveillement, le bon, l'effrayant... Questionner ces concepts m'enseigne des choses sur moi, sur le monde.

Apprécier un bon repas, goûter de la subtilité des délices d'un bon plat, n'est ce pas spirituel? Pourtant, il y a une grandeur, un élan de sublime que cherchent bien souvent les cérémonies religieuses. N’est- on pas en plein rapport entre le corps et l'esprit, que les définitions de ces termes soient matérialistes ou non.

Il en est de même du sexe, de toute forme de plaisir. Quelle que soit notre sexualité, dans la mesure au chacun est consentant, le plaisir et le contact avec l'autre sont potentiellement une ouverture à la spiritualité. Il en est de même de l'alcool, du confort, de toute source de plaisir.

L'art, et-ce qu'un athée est insensible à l'art? Non. Je puis être retourné par la magnificence de Bach. Cet homme composait pour dieu, mais il touchait et exprimait des sentiments humains. Nous les nommons d’une manière différentes, les interprétons autrement, c'est tout. L'art est le lieu même de la spiritualité, cet acte inutile qui devient nécessaire, quoi de plus grand et plus spirituel?

La science elle-même nous offre une interprétation du monde, une compréhension chargée de poésie. L'histoire de l'évolution, par exemple, est digne des plus grandes épopées, est aussi riche en enseignement que n'importe quel texte religieux pour qui accepte de la regarder et surtout de s'émerveiller. Car la science à ceci de poétique qu'elle peut être une sublime source d'émerveillement.

Le sens de la vie, qui pour moi est le sens que JE donne à MA vie est un forme de spiritualité, de quête permanente. Je ne peux que citer Hermann Hesse,(dont je recommande la lecture de tout les ouvrages), dans Le jeu des perles de verre:"
Que tu deviennes professeur, savant, ou musicien, aie le respect du "sens", mais ne t'imagine pas qu'il s' enseigne."

La spiritualité, que je reconnais comme bien difficilement définissable, est possible pour tous, elle n'est la propriété de personne. Se l'approprier c'est déjà la diminuer. Elle n'est ni bien, ni mal, il est des positions spirituelles que je réfute, car rien n’est absolu.

J'ose espérer que des athées et des croyants ont pu se reconnaitre dans mes propos.

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